Pourquoi les programmes relationnels deviennent-ils des marques ?
Un double phénomène presque synchronisé dans le temps attire l’attention des spécialistes du marketing et de la communication :
- l’annonce du contrat de sponsoring maillot du PSG avec la marque du futur programme de fidélité du groupe Accor, ALL ;
- et la diffusion d’un film publicitaire de 90 secondes pour promouvoir le programme de fidélité Marriot Bonvoy lors de la cérémonie de remise des Oscars.
Le programme de fidélité comme teasing promotionnel pour la fidélisation client
Le cas Accor, le teasing du programme de fidélité ALL
Du côté européen, le groupe Accor fait un teasing depuis le 21 février de son futur programme de fidélité ALL - pour Accor Live Limitless - qui devrait voir le jour d’ici fin 2019.
ALL est présenté comme un programme dépassant largement le périmètre des séjours à l’hôtel et promet d’être une véritable expérience lifestyle : les porteurs de carte de ALL, sans nécessairement voyager, pourront bénéficier d’avantages avec des dizaines de partenaires du groupe Accor (pour le moment une douzaine de sociétés, un cercle bientôt élargi à des sociétés dont Accor ne sera pas nécessairement actionnaire, dont par exemple AEG, acteur leader de l’organisation de concerts et festivals, qui gère l’AccorHotels Arena à Paris) : concerts, cuisine, spectacles et évènements sportifs, etc.
L’annonce de la signature d’un contrat de sponsoring maillot avec le PSG pour médiatiser la marque ALL a eu un retentissement spectaculaire : non seulement du fait du contexte côté PSG (fair play financier et nécessité de remplacer l’ancien sponsor Fly Emirates) mais aussi et surtout pour la nature de la marque sponsor et le montant du contrat. En effet, c’est la première fois qu’un programme de fidélité bénéficie d’une marque aussi forte, indépendante de la société qui le porte, et d’une couverture publicitaire aussi massive : le contrat de sponsoring maillot dont le montant n’est pas officiellement communiqué, est estimé à plus de 50 millions d’Euros par an et pour une période d’au moins trois ans...
Le cas Marriott Bonvoy, la diffusion du programme relationnel « Bon Voyage »
Cette stratégie du groupe Accor rappelle la création d’un programme concurrent dès 2018 : le programme Marriott Bonvoy™ (pour “Bon Voyage !”).
Du point de vue des univers et des partenaires, les deux programmes se ressemblent comme deux gouttes d’eau, du moins à ce stade. Les univers, présentés sur le site Marriott Bonvoy Moments sont les mêmes que ceux que Sébastien Bazin mentionne lorsqu’il présente le futur ALL dans les grandes lignes : lifestyle, cuisine, évènements sportifs et musicaux.
Le parallèle se prolonge lorsqu’il s’agit de stratégies de communication et de moyens : dans les deux cas, une marque autonome est créée, et plusieurs dizaines de millions d’Euros sont investis dès la première année pour la promouvoir. Dans le cas de Bonvoy, c’est son placement comme annonceur principal lors de la cérémonie de remise des Oscars le 24 février qui a fait parler. Le coût média de ce nouveau format de placement publicitaire aux Oscars est estimé à 7 millions d’Euros. Enfin, dans les deux cas, les marques ont choisi le sponsoring d’un club de foot majeur pour se faire connaître dans le monde, grâce à des clubs de foot dont les fans sont répartis sur tous les continents : PSG pour ALL, donc, et Manchester United pour Bonvoy.
Ce phénomène de branding des programmes de fidélité est-il un phénomène exceptionnel, ou limité au secteur du travel ? Peut-il toucher d'autres secteurs et constituer une tendance plus large du marketing ?
Les programmes de fidélité et le marketing relationnel appliqués à d’autres secteurs
Il existe un grand nombre de clubs de fidélité ou de programmes relationnels ayant constitué leur propre marque. Mais peu ont été médiatisés de manière autonome. Nous pouvons toutefois donner deux autres exemples, très différents.
Nike+, la marque relationnelle dans le domaine du marketing sportif
Dès 2006, Nike+ était un pionnier du sport connecté, et avait permis aux runners d’enregistrer leurs efforts grâce à un petit device inséré dans la semelle de la chaussure et à un iPod. Il s’agissait déjà, pour le fabricant de chaussures, d’un format de programme relationnel, communautaire, et il était déjà fondé sur un partenariat avec une autre marque, en l’occurrence Apple. Mais plus fort encore, il constituait déjà une marque pratiquement indépendant, même si elle intégrait le nom de la marque mère, avec son propre site et ses propres films publicitaires (dont voici un exemple datant de 2009).
Depuis, Nike+ a pris du poids et est réellement devenu le programme relationnel de Nike, si bien que le compte utilisateur sur le site de la marque est assimilé au programme Nike+, et que le programme englobe tous les sports.
La promesse relationnelle du marketing audio du Groupe Vinci Immobilier
En septembre 2018, la marque Vinci Immobilier 4YOU est lancée avec une large campagne publicitaire comprenant notamment de la TV et de la radio. Il s’agit bien d’une marque autonome, avec son propre logo et son propre site web.
Il s’agit bien d’une marque relationnelle, créée pour communiquer et valoriser une promesse forte : celle de garantir la satisfaction du client, en s’engageant concrètement sur le respect des délais et de la qualité. En cas d’éventuel non respect, des compensations importantes sont promises, jusqu’à 5% du prix du bien en cas de retard de livraison et jusqu’à 2000€ pour les réserves à la livraison non levées… Un engagement disruptif dans ce secteur où la satisfaction client était jusque là encore peu considérée. En apportant une telle attention au suivi des clients livrés, Vinci Immobilier montre que la fidélisation joue un rôle désormais croissant dans sa stratégie.
Le programme relationnel en guise d’ambassadeur de marque influe-t-il réellement sur la relation client ?
Créer une marque de programme relationnelle autonome et la médiatiser a d’abord de quoi surprendre. Cela s’inscrit dans une tendance qui s’est amplifiée ces dernières années, qui consiste à créer des marques plus relationnelles que transactionnelles. S’ancrer dans la vie des gens, comprendre les usages et attentes pour mieux y répondre, avec une importance croissante du service et de l’attention portée à la satisfaction est devenue un quête vitale pour la plupart des marques.
Mais créer une marque-programme relationnel relève d’une démarche différente : il s’agit de donner de la consistance à la part de contenus et de services qu’est capable de véhiculer la marque, afin de l’installer plus durablement dans la vie de ses cibles. Cela demande déjà une certaine maturité de la marque et une capacité à fédérer autour d’elle un écosystème de partenaires et de services donnant corps à la promesse faite au client.
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